Et si écrire devenait un acte sacré ?
Quand une prêtresse du candomblé écrit sur l’histoire de l’esclavage et interroge notre rapport aux spiritualités africaines et plus largement à notre histoire.
Avec Namata, là où tout commence, Yalorisha Virginie signe chez Mindset Éditions un roman où littérature et spiritualité se rencontrent. Prêtresse initiée, elle fait dialoguer les voix des femmes, des ancêtres et des lignées effacées. En réconciliant la raison et le sacré, son œuvre propose une réflexion profonde sur la transmission, la mémoire et la quête d’identité dans le monde contemporain.
Quand la mémoire collective devient intime
Nous vivons dans un monde où les repères s’effritent, où les identités se cherchent et se heurtent. Aujourd’hui, la question des racines n’a jamais été aussi brûlante. Nous portons tous des mémoires héritées, qu’elles soient familiales, sociales, historiques, et elles continuent de nous traverser sans que nous en ayons conscience.
C’est cette mémoire invisible que la prêtresse et autrice Yalorisha explore dans Namata, là où tout commence, un roman initiatique à la croisée de la littérature, de la spiritualité et de l’histoire.
À travers la double voix d’une femme africaine déportée au XVIIIᵉ siècle et d’une autrice contemporaine en pleine initiation spirituelle au Brésil, Yalorisha donne chair à une question universelle : Comment réparer les lignées qui nous habitent ?
Les cicatrices du passé, encore inscrites dans nos corps
Le récit de Namata, jeune femme arrachée à son village et réduite en esclavage, révèle la violence des traumatismes qui se transmettent à travers le temps.
“Il faut briser un être humain pour en faire un esclave”, écrit Yalorisha.
Mais ces chaînes ne sont pas que physiques : elles deviennent intérieures. Les “prisons mentales” évoquées dans le roman résonnent avec nos propres conditionnements. Qu’ils soient familiaux, culturels ou spirituels, ils continuent de modeler nos existences.
Des spiritualités trop longtemps incomprises
Pourquoi le mot « vaudou » évoque-t-il immédiatement la peur en Occident, alors que le chamanisme amazonien ou les spiritualités asiatiques inspirent plutôt le respect ? Cette question traverse tout le roman de Yalorisha. Namata, là où tout commence révèle comment les spiritualités africaines restent marquées par une vision héritée de l’époque esclavagiste.
Nous découvrons que ces traditions ont permis à des peuples déracinés de préserver leur humanité, leur dignité, leur âme. Ce sont des cultures de résistance qui méritent d’être comprises pour ce qu’elles sont : une sagesse ancestrale.
Quand la littérature devient mémoire vivante
L’écriture de Yalorisha, charnelle et poétique, fait de la littérature un espace de réconciliation.
“C’est Namata qui m’a chuchoté son histoire”, confie-t-elle.
À travers ce dialogue entre les siècles, Namata, là où tout commence ne parle pas seulement d’esclavage ou de rituels : il parle de la façon dont nos blessures collectives s’inscrivent dans le présent, et de la possibilité de les transformer en lumière.
Réparer les lignées, retrouver le lien
La spiritualité comme résistance et transmission
Dans les pages de Namata, là où tout commence, les spiritualités afro-brésiliennes apparaissent non pas comme des croyances ésotériques, mais comme des outils de survie et de résistance. Nées dans l’enfer de l’esclavage, elles ont permis à des peuples déracinés de préserver leur humanité, leur dignité, leur âme.
“Dans les bateaux négriers, des passagers clandestins étaient à bord, invisibles mais présents : les divinités vaudous du peuple Fon, les orishas des Yorubas, les ancêtres, forces de tous.”
Ces traditions, encore diabolisées en Occident, rappellent qu’il existe une autre manière de prier, une autre manière de guérir, en retournant à la terre, en honorant les ancêtres, en se souvenant.
L’universalité du culte des ancêtres
Le roman invite chacun, quelle que soit son origine, à renouer avec sa propre lignée. Car nous portons tous, à notre manière, des mémoires familiales silencieuses : guerres, migrations, violences, deuils tus. Honorer ses ancêtres, c’est reconnaître ces transmissions invisibles et choisir de les transformer.
“Nos cérémonies arrivaient à nous faire transcender notre souffrance et nous permettaient de trouver la force de rester debout, fiers et vivants.”
Une littérature de la réparation
Namata s’inscrit dans un mouvement littéraire émergent : celui de la littérature de la réparation, où la fiction devient un outil de guérison collective. Le roman ne cherche pas le confort, mais la vérité. Il interroge notre rapport à l’Histoire, au sacré, à la responsabilité de ceux qui héritent, consciemment ou non, des blessures du passé.
Ce livre questionne différemment selon qui le lit. Il offre une reconnexion à ceux qui y reconnaissent leurs ancêtres, et invite les autres à s’interroger sur ce que nous avons tous hérité, consciemment ou non, des récits qui ont façonné notre vision du monde. Parce que tant que nous ne regardons pas ces mémoires, elles continuent de nous habiter.
“L’écriture est devenue pour moi un prolongement du rituel, un acte de mémoire et de réparation.”
Une vie entre deux mondes, entre code et rituel
Virginie Lamien, Yalorisha, est prêtresse du candomblé et consultante en accompagnement digital en Suisse romande. Après quinze ans dans le monde de la transformation digitale, un changement de cap la mène à Recife, au Brésil, où elle s’initie aux cultes des orixas. En 2017, elle reçoit le titre de Yalorisha — “prêtresse du culte des orixas”.
Elle propose aujourd’hui des accompagnements autour de la médecine des orixas et anime le podcast Mille et une façons de vivre sa Foi. Namata, là où tout commence est son premier roman. Elle travaille actuellement sur un second livre consacré à Marie Laveau, la célèbre prêtresse vaudou de la Nouvelle-Orléans.
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