Du violon seul de l’album “Obsessions” à la scène vivante des Musicales d’Assy : Pauline Klaus, une artiste à l’écoute d’un monde en résonance

Et si le silence était devenu un luxe ?

À l’heure où tout s’enregistre, se diffuse, se consomme à la vitesse d’un clic, une violoniste choisit de s’arracher au vacarme pour retrouver, seule, la vibration nue d’un archet sur une corde. Pas d’orchestre, pas de fioritures : juste un corps, un bois, un souffle.

Pauline Klaus publie Obsessions, un premier album solo qui n’a rien d’un simple disque, plutôt une cartographie intérieure, sculptée dans l’ombre du violon seul, traversée par Bach, Juan Arroyo, et le souvenir exigeant de Tedi Papavrami.

Mais ce geste radical ne s’est pas façonné en studio. Depuis dix ans, cette artiste formée au CNSMD de Paris construit, en parallèle de son travail d’interprète, un îlot d’écoute à ciel ouvert : Les Musicales d’Assy. Un festival né au cœur des Alpes, sur les hauteurs de Passy, où la musique s’inscrit dans le paysage et le patrimoine avec une précision d’orfèvre.

En 2025, le festival célèbre sa 10ᵉ édition. Dix ans d’un compagnonnage entre nature et création, d’un engagement artistique profondément situé, loin des projecteurs mais au plus près de l’essentiel : faire de chaque note un acte de présence.

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Une géographie intérieure mise en partage

Obsessions n’est pas un album de violon solo au sens habituel du terme. Il s’agit d’un projet où le répertoire ne sert pas un programme, mais un propos. Celui d’une musicienne qui, après des années de scène et d’engagement collectif, choisit de s’exposer seule, sans artifice ni accompagnement, pour explorer ce que l’instrument peut encore dire lorsqu’on le débarrasse de tout ce qui pèse.

Formée au CNSMD de Paris, Pauline Klaus s’est d’abord forgée à travers le répertoire classique et les grands standards. Mais très tôt, un autre besoin s’est imposé : celui de bâtir un espace à la mesure de ses préoccupations artistiques. « Dès la fin de mes études, j’ai ressenti le besoin de construire un espace d’expression artistique qui me ressemble, à la fois exigeant et accessible », dit-elle. Ce fut le point de départ des Musicales d’Assy, fondées en 2015 dans un écrin naturel au pied du Mont-Blanc.

Entre-temps, le travail personnel d’interprétation se creuse, se densifie. Obsessions est l’aboutissement de cette ligne souterraine. Un disque comme un journal d’atelier, à la fois rigoureux dans sa conception et instinctif dans son incarnation. Une « prise de parole qui interroge la solitude de l’interprète et la manière dont le violon peut devenir un lieu de résistance poétique. « un projet intime et le prolongement naturel de mon engagement artistique sous toutes ses formes. », précise-t-elle encore.

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Un disque traversé par des présences : Juan Arroyo, Tedi Papavrami et l’ombre portée de Bach

L’intitulé de l’album, Obsessions, évoque autant la répétition que l’exploration. Il s’agit ici de revenir, obstinément, à des motifs, des questions, des matières sonores, dessinant une généalogie. Le disque réunit ainsi des œuvres rares, résonant entre elles, et deux pièces inédites du compositeur péruvien Juan Arroyo, écrites spécialement pour Pauline Klaus. Un compagnonnage décisif.

Ce lien avec la création contemporaine n’est pas opportuniste : il s’inscrit dans une longue attention portée au présent de la musique, à ses voix vivantes, tant dans son travail d’interprète que comme directrice artistique. En parallèle, un autre fil s’est tissé avec le violoniste Tedi Papavrami. Ensemble, ils ont travaillé sur les transcriptions personnelles de Bach réalisées par ce dernier. Une rencontre déterminante pour l’album, qui donne lieu à un dialogue exigeant avec l’un des socles du répertoire.

« Son approche du texte, exigeante et toujours organique, m’a profondément influencée. Cette immersion dans l’univers de Bach, à travers le regard d’un maître, et plus particulièrement dans ces œuvres écrites à l’origine pour l’orgue, a renforcé mon désir de proposer une lecture personnelle du violon seul, entre rigueur, intériorité et engagement poétique », confie-t-elle.

Ainsi, Obsessions n’est ni un objet-musée, ni une simple vitrine technique. C’est un disque dans lequel le violon devient un outil d’écoute du monde intérieur, traversé par des voix amies, des influences, des mémoires. Un espace de solitude habitée.

Un festival comme laboratoire : Les Musicales d’Assy, 10 ans d’écoute en altitude

Ce même esprit guide Les Musicales d’Assy, festival que Pauline Klaus a fondé en 2015 dans un lieu singulier : la montagne de Passy, face au Mont-Blanc. À mille mètres d’altitude, l’événement articule musique de chambre, créations contemporaines, rencontres pédagogiques et concerts en immersion. Loin des modèles urbains ou institutionnels, Les Musicales fonctionnent comme une ruche où se croisent musiciens confirmés, jeunes compositeurs, publics locaux et visiteurs de passage.

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En dix ans, le festival a su construire une identité propre, mêlant exigence artistique et ouverture. Sa programmation reflète cette volonté de faire dialoguer les répertoires, romantique, contemporain, tout en s’inscrivant dans le rythme du lieu. La nature, le silence, les éléments jouent ici un rôle actif : la musique y résonne autrement, plus dense, plus proche.

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Pour Pauline Klaus, ce festival est aussi une manière d’inscrire ses projets personnels dans un cadre collectif. « Je souhaite continuer à faire évoluer Les Musicales d’Assy comme un espace d’accueil pour mes projets personnels, comme pour ceux qui m’entourent : un lieu vivant où se croisent créations, concerts, enregistrements et pédagogie », explique-t-elle.

L’édition 2025, la dixième, portera cette ambition à une nouvelle intensité : accueillir la sortie d’Obsessions comme un moment de partage, de prolongement scénique et de dialogue avec le public. Loin d’être une vitrine, le festival devient le prolongement organique d’un geste artistique.

Une esthétique de la cohérence : du son au lieu, de l’intime au collectif

Ce qui fait la singularité de Pauline Klaus ne se résume pas à un style de jeu ou à un programme discographique. C’est une cohérence d’ensemble : un travail de fond où chaque projet nourrit l’autre. L’album Obsessions éclaire d’un jour nouveau son travail de directrice artistique, tandis que le festival révèle la dimension collective de sa démarche d’interprète.

Son univers artistique se définit par une attention aux liens — entre les œuvres, les compositeurs, les espaces, les publics. Le violon n’est jamais ici une fin en soi, mais une voie d’accès à quelque chose de plus large : une manière d’habiter le monde par le son. C’est ce que traduit également son lien fort avec les lieux. Que ce soit pour choisir un site de concert ou un lieu d’enregistrement, elle cherche toujours une résonance entre l’œuvre et son contexte. Une esthétique du site spécifique.

Son approche artistique repose enfin sur des affinités humaines fortes. « Je m’entoure d’artistes et de collaborateurs avec lesquels le lien humain est aussi fort que l’exigence artistique — cela crée une cohérence et une vérité qui résonnent dans chaque projet », affirme-t-elle.

Deux temps forts, une seule trajectoire

En 2025, Pauline Klaus pose deux pierres majeures dans son parcours : un album qui condense des années de recherche intérieure, et une édition anniversaire de festival qui célèbre dix ans d’engagement dans un territoire.

Ces deux actualités ne s’opposent pas, elles s’éclairent. D’un côté, l’exploration du violon seul comme un espace d’introspection, de l’autre, une scène vivante où la musique devient partage et communauté.

Ce qui les relie : un souci d’authenticité, une fidélité à une vision musicale exigeante, ouverte, située.

En savoir plus

Les Musicales d’Assy : https://www.lesmusicalesdassy.fr/

Site web : https://www.paulineklaus.com/

Facebook : https://www.facebook.com/pauline.klaus.549

Instagram : https://www.instagram.com/pauline.klaus?igsh=MWJzaDZ3ZTNubTUwNA==

LinkedIn : https://www.linkedin.com/in/pauline-klaus-975aa3136/

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