Quand le système de santé est malade : le décès d’une jeune femme de 32 ans aurait pu être évité grâce à une simple prise de sang

Tout le monde a conscience de l’urgence de réformer en profondeur le système de santé en France. Car derrière les chiffres, il y a des vies, parfois brisées de façon tragique lorsque surviennent des défaillances.

Comme celle de Flavy Bousquet, une jeune femme de 32 ans et heureuse maman de 5 enfants.

Suite à un manquement grave lors de sa prise en charge aux urgences, Flavy est brutalement décédée le 23 novembre 2016.

Guillaume, son mari, a récemment obtenu la condamnation de l’hôpital de Guebwiller (Alsace) après 6 ans de bataille juridique.

Guillaume, Flavy et leurs 5 enfants

Guillaume, Flavy et leurs 5 enfants

De la fièvre et des maux de tête

En novembre 2016, Flavy passe quatre jours clouée au lit, avec de la fièvre et des maux de tête. Soudain, elle semble ne plus entendre ni voir correctement, et son élocution est difficile.

Guillaume, son époux, appelle alors le 15 et Flavy est emmenée au service des Urgences de l’hôpital de Guebwiller.

Deux heures plus tard, Guillaume peut venir chercher Flavy. L’équipe de garde lui a administré du paracétamol pour faire baisser la fièvre, puisqu’elle avait 40,3° en arrivant.

Flavy, encore extrêmement faible, est amenée à la voiture en fauteuil roulant. Guillaume l’installe côté passager et passe à la pharmacie pour prendre l’Advil prescrit par le médecin.

Flavy ne supporte pas d’être assise, elle bascule à l’arrière pour s’allonger. De retour chez eux, Guillaume la couche. Tandis qu’il s’endort, Flavy ne parvient pas à s’endormir : elle souffre de maux de ventre.

Dans la nuit, elle perd connaissance deux fois. A 6h du matin, Guillaume rappelle le 15. Comme la tension de Flavy est trop basse, l’ambulance ne peut pas la déplacer et contacte le SMUR.

Une nouvelle admission aux urgences

Flavy est emmenée d’urgence à l’hôpital de Colmar. Avant de partir de la maison, ses enfants ont tout juste le temps de venir lui faire un bisou.

Personne ne le sait encore, mais ce sera le dernier qu’ils feront à leur mère vivante. Guillaume, qui tient les portes pour faciliter le déplacement du brancard, n’a même pas le temps de l’embrasser ni de lui dire au revoir.

Pourtant, lui non plus ne reverra pas Flavy vivante.

Dès son arrivée à l’hôpital, elle est opérée en gynécologie car les médecins soupçonnent une grossesse extra-utérine. On dit à Guillaume de rentrer chez lui en attendant des nouvelles. L’après-midi, il apprend que son épouse est en état de choc, ils la maintiennent endormie et vont la transférer en réanimation.

On lui parle d’une probable maladie auto-immune. Guillaume est invité à se rendre au service de réanimation vers 15h. Après une heure d’attente, on le fait entrer pour le conduire dans une petite pièce.

Un médecin lui annonce que la situation est très grave. Environ 30 minutes plus tard, un autre médecin le prévient que son épouse est entre la vie et la mort. Ensuite, très vite, on vient lui annoncer son décès.

 On me parle d’une méningite foudroyante. Ma vie bascule, c’est un véritable tsunami !

Les interrogations sur les soins administrés par le service des urgences de l’hôpital de Guebwiller

Tout le monde se pose les mêmes questions : Est-ce que Flavy aurait pu être sauvée ? Pourquoi le service des urgences de l’hôpital de Guebwiller n’a-t-il réalisé aucune analyse de sang, alors même qu’une perfusion avait été posée pour administrer du sérum physiologique et du paracétamol ? Pourquoi recommander la prise d’Advil alors que la possibilité d’une infection n’avait pas été écartée ?

Guillaume lance une première procédure précontentieuse. Un expert médical est chargé d’établir s’il y a eu un manquement dans la prise en charge à Guebwiller ou à Colmar. Il conclut que tout le monde a fait son travail correctement.

L’hôpital est condamné à une peine dérisoire

Non satisfaits de l’expertise, Guillaume et son avocat Maître Raffin partent en quête d’avis d’experts médicaux indépendants.

La responsabilité de l’hôpital de Guebwiller apparaît évidente à ces derniers, elle est évaluée par l’un des experts à 80% de perte de chances de survie.

Fort de ces résultats, Guillaume et son avocat lancent une procédure devant le tribunal administratif début 2021.

Suite à une première audience favorable, le juge mandate un nouvel expert médical. Celui-ci aboutit au même résultat.

Fin 2023, le juge rend son verdict :

Il résulte de l’instruction, et notamment du rapport de l’expert désigné par le tribunal, que le manquement imputable au centre hospitalier de Guebwiller a fait perdre une chance de survie à Mme Bousquet qui peut être estimée à 80 %. (extrait du jugement)

Flavy aurait donc pu être sauvée si l’hôpital de Guebwiller avait réalisé une simple prise de sang…

Pourtant, seulement 10 % du montant des préjudices demandés sont octroyés, ce qui est loin de concorder avec la gravité de la faute établie.

Sensibiliser et briser le silence pour faire bouger les lignes

Quelques jours après l’enterrement de son épouse, Guillaume avait reçu les résultats de l’analyse de sang demandée par l’hôpital de Colmar le jour du décès : pas de trace de méningite.

Guillaume avait été assailli de questions : “Si Flavy n’est pas décédée d’une méningite, de quoi est-elle décédée ? Comment se fait-il qu’elle soit morte moins de 24 heures après son passage aux urgences ? Pourquoi n’ont-ils rien vu ? Auraient-ils dû faire une prise de sang ?”

Il a fallu attendre 6 ans pour que la procédure juridique permette à Guillaume d’élucider un point essentiel : parmi toutes les hypothèses plausibles, la méningite foudroyante est la seule pertinente. Trois experts médicaux ont conclu dans ce sens. Le résultat négatif de la prise de sang s’explique par l’administration d’antibiotiques le matin du 23 novembre, lesquels ont détruit tous les germes de la méningite.
Guillaume a donc pu l’expliquer à ses enfants et, ensemble, ils vont pouvoir tourner cette page.

De plus, en levant officiellement le voile sur les manquements à la prise en charge et en révélant tous les faits, le jugement rendu aide la famille à avancer sur le chemin du deuil.

Mais il est désormais nécessaire d’aller plus loin.

Se poser les bonnes questions pour améliorer le système de santé

Les experts sont unanimes : les symptômes de Flavy auraient dû immédiatement faire soupçonner une méningite, et donc impliquer une prise de sang et/ou une ponction lombaire.

Cette situation interroge sur les raisons qui poussent un médecin à ne pas faire le nécessaire face à des symptômes si évidents. Est-ce le manque de moyens techniques et humains ? Un manque de lucidité dû à une trop grande fatigue ? Ou une simple négligence humaine ?

Une autre dimension pose question : au vu de la responsabilité de l’hôpital, sa condamnation à ne payer que 10 % des indemnités surprend. Car cette somme s’avère insignifiante pour l’hôpital, comme pour l’État. Que vont-ils retenir de cette histoire ? Qu’est-ce qui va réellement changer dans les pratiques ?

À propos de Guillaume Bousquet et de sa famille

En 2004, alors qu’ils ont 20 ans, Guillaume et Flavy se marient.

Guillaume, alors enseignant remplaçant à Nantes, donne des cours de français dans le secondaire. Il passe le concours de professeur de Lettres Modernes et obtient sa titularisation en 2008.

Ils deviennent rapidement parents : leur fille aînée, Naomi, naît en 2005, Salomon en 2007, Héloïse en 2009, et Ludivine en 2011.

Durant l’été 2013, ils déménagent en Alsace et apprennent que Flavy est enceinte d’un cinquième enfant atteint d’une malformation cardiaque congénitale sévère.

Yonaëlle naît fin avril 2014. Elle aurait dû être opérée à la naissance, mais elle est battante et passera au bloc à 4 mois seulement.

Quand Flavy décède le 23 novembre 2016, leurs enfants ont 11 ans, 9 ans, 7 ans, 5 ans et 2 ans et demi. Yonaëlle a déjà subi 4 opérations à cœur ouvert. La cinquième aura lieu moins d’un an après le décès de sa mère.

De son côté, Guillaume est d’abord en arrêt maladie, puis en congé pour présence parentale. Durant cette période, il rencontre Prisca et ses deux enfants. Ils décident de vivre ensemble en 2018 et assument leurs 7 enfants, âgés de 4 ans à 14 ans. Ils quittent ensuite l’Alsace et se marient en 2021 dans le Sud Ouest.

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Guillaume, sa nouvelle épouse Prisca, et leurs 7 enfants

Après ce tsunami, Guillaume veut donner encore plus de sens à sa pratique professionnelle. Il crée Pédago’Vie en 2018, une auto-entreprise de formation et d’accompagnement pédagogique qui “apprend à apprendre”. Elle intervient en présentiel partout en France, en Belgique et en Suisse.

En 2021, il lance en parallèle une société qui diffuse des formations e-learning et du matériel pédagogique en France et à l’étranger.

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